Rare et intéressant, un tel travail artistique dans la lignée de l'expressionnisme allemand du XXè siècle auquel Jean-Paul Mabire accorde son expérience du dessin, de la gravure et de la peinture.

Remarquable également est son intérêt pour Frida Kahlo, épouse et disciple de Diego Rivera, ainsi qu'envers des écrivains-poètes liés au surréalisme, aux expressionnistes et aux créateurs contemporains.

Ainsi, notre artiste normand a-t-il été amené à rechercher l'impact d'une réalité ombrageuse, destinée à faire réagir plutôt qu'à séduire systématiquement.

Jean-Paul Mabire peint la vie crûment, avec ses refus, ses douleurs, ses cris, sans négliger pour autant de simples et tendres instants hors du temps. L'artiste sait admirablement composer l'essentiel d'une anedocte, et en quelques lignes assurées et d'émouvantes couleurs, il compose un univers étrange, bouleversé, marqué de symboles et de repères où revivent des visages plus ou moins célébrés par l'Histoire, mais d'une explicite valeur visuelle, grâce à son instinct fébrile et hardiment caustique.

Cette peinture se transforme ainsi en langage, en saga d'êtres quêtant leur destin, subissant leur déclin et leurs faiblesses, mais recherchant malgré tout un espoir par la valeur de regards orientés vers d'étranges envols ou d'impensables rencontres, en couleurs alternées elles-aussi, de pessimisme ou d'espoir et de beauté.

André Ruellan
Critique d'art.


C'est le goût de la déformation et de l'absurde propre aux écrivains expressionnistes qui est à l'origine du travail de Jean-Paul Mabire. En 1997 ce furent les textes de Franz Kafka (Le Château, l'Amérique) qui servirent de matière à une série de peintures réalisées sur carton d'emballage.

La gravure est un désir lointain de l'artiste qui lui permet de prolonger son travail du trait par la technique de la pointe sèche ou de l'eau forte. Autrement dit de privilégier le travail de la main, du tracé. Le trait et la couleur sont essentiels pour J.P. Mabire : peindre revient à penser graphiquement, au-delà de l'impression rétinienne, pour parvenir à la réflexion. Aussi n'est-il pas étonnant de rencontrer Max Beckmann (1884-1950) et Roland Topor (1932-1998) dans sa peinture : le premier pour son goût de l'autoportrait et de la connaissance de soi ("L'art sert la connaissance et non pas le divertissement, la sublimation ou le jeu" M. Beckman 1938) ; le second pour le rire et le goût de l'absurde. La peinture comme trait d'esprit en somme.

OHM. Journal de l'Ecole régionale des Beaux-Arts de Caen
Mai 2000